Carnet noir


Par Jérémie Borel

J’ai reçu hier soir un mail de ma soeur qui se plaignait d’être la dernière au courant de la mort de Satoshi Kon. Après être tombé de ma chaise et m’être hyperventilé pendant trois minutes, avalant au passage deux kilos de morve, je fis un petit tour sur le web pour en avoir le coeur net et là, sur wikipédia une phrase laconique:

Satoshi Kon, réalisateur japonais de film d’animation, est décédé le 24 août des suites d’un cancer du pancréas.

Maître incontesté de l’animation japonaise aux côtés de Hayao Miyazaki, Mamoru Oshii, Katsuhiro Otomo et autres Isao Takahata, Satoshi Kon n’eut le temps de réaliser que quatre films: Perfect Blue, Millennium Actress, Tokyo Godfathers et Paprika. Quatre chefs-d’oeuvres. Des films ambitieux, complexes, vibrants, sincères et profonds. Il en préparait un cinquième, The Dream Machine qui ne verra peut-être jamais le jour.

Les films de Satoshi Kon ont exercés une influence certaine parmi les grands réalisateurs contemporains tels que Christopher Nolan ou Darren Aronofsky. Ce dernier révère tellement Perfect Blue qu’il en acheta les droits, glissa dans Requiem For A Dream une scène hommage (copiant la scène de la baignoire) et semble avoir fait de son prochain film (Black Swan avec Natalie Portman) un presque remake, suivant la chute d’une star (une actrice chez Kon, une danseuse étoile chez Aronofsky) dans la folie et la paranoïa, floutant la frontière entre rêve, fiction et réalité.

Perfect Blue Requiem For A Dream

Si vous pensiez que Inception était une oeuvre puissante et tourbillonnante sur le pouvoir des rêves et l’étoffe dont ils sont faits, je vous invite à regarder l’extrait ci-dessous de Paprika, ultime chef-d’oeuvre d’onirisme du maître Kon et à visionner le reste de sa filmographie (au moins, pendant ce temps-là vous ne vous trouverez pas obligé de regarder le marathon du gendarme de St-Tropez sur TF1)

Alors que l’absurdité de la perte d’un si grand réalisateur me frappe comme un bus scolaire lancé à 130 km/h sur une avenue sans ornières, des questions existentielles m’assaillent: Pourquoi la Mort emporte-elle un cinéaste passionnant et talentueux alors qu’au même moment, Michael Bay réalise Transformers 3 en pleine santé? Pourquoi ne retire-t-elle pas les fonctions motrices de Shia Laboeuf avant de l’achever d’une maladie rare et honteuse? Pourquoi le réalisateur de Daredevil n’est-il pas dévoré par une horde de cochons d’Inde berserks et tuberculeux? Elle aurait pu emporter tout le casting de Twilight dans une gigantesque combustion collective et spontanée ou empêcher ce sale révisionniste de George Lucas de saloper sa propre oeuvre filmique par une embolie graisseuse bien placée. Elle aura préféré nous arracher l’un des plus talentueux réalisateurs de films d’animation de son temps.

Sale garce.

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3 Responses to Carnet noir

  1. MacBrains says:

    J’avoue avec grande honte que je ne connaissait même pas le bonhomme. Comme souvent, il faut attendre la mort de certains artistes pour en entendre parler. Dommage…

  2. burninghat says:

    oh shit! Je ne savais pas qu’il était mort! Je suis totalement fan de « Tokyo Godfathers » (des autres aussi mais particulièrement de celui-là).

  3. C’est pas pour en rajouter dans le pathos mais Alain Corneau vient de décéder. Un autre grand cinéaste nous quitte. Comme dirait George Abitbol: « Monde de merde. »

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