Et c’est qui le lion maintenant ?
25/10/2010 5 commentaires
Par David Borel
Voilà quelques jours de cela, Apple nous a gratifié d’une présentation de produit dont elle a le secret (une « Keynote » en anglais dans le texte). Les éléments constitutifs de cet événements ayant été repris et détaillés à bien des endroits (chez Macgénération, pour ne citer qu’eux), mon intention n’est donc pas de revenir en détails sur les annonces de la semaine passée mais plutôt de vous livrer les quelques réflexions que cela m’inspire.
Avant de débuter, et pour mémoire, listons les nouveautés:
- Arrivée de iLife 11, avec un mode plein écran et plein de nouvelles fonctionnalités.
- FaceTime pour Mac
- OS X 10.7 « Lion » dont quelques éléments ont été révélés, en attendant son lancement courant 2011
- 2 nouveaux MacBook Air
Au-delà des détails livrés par Apple, cette conférence est révélatrice de l’orientation stratégique de la firme de Cupertino, et ceci à plusieurs titres.
La forme
La forme de cette keynote, tout d’abord. Habituellement, les annonces liées à OS X se faisaient dans de grandes salles bondées de fanboys applaudissant à tout rompre la performance d’un Steve Jobs au sommet de son art. Cette année, Apple s’est contentée d’une « petite salle » et le publique d’applaudissements polis. Faut-il comprendre qu’OS X ne mérite plus les lumières de la grande scène, réservées à iOS et autres iPhones ? Ce qui, pour toute autre société, aurait passé pour un événement important prend, à l’échelle d’Apple, les allures d’une annonce dans une ambiance feutrée.
Ensuite, la durée. L’iPhone 4 a eu droit à 1h52 en juin (WWDC 2010), iTunes et l’iPod à 1h11 en septembre et « le Mac » à 1h31 pour ce « special events », ce qui le place entre l’iPod et l’iPhone en terme de temps consacré.
Avec le menu, on ne peut pas dire qu’il n’y avait pas de quoi tenir 2h. Jobs n’a sans doute pas voulu trop s’étendre sur Lion, encore loin de sa release et sans doute présenté en octobre pour occuper le terrain face à Windows 7. Il est piquant, à ce propos, de constater que, quand Microsoft réagi enfin face à OS X avec un OS réussi, c’est avec un temps de retard sur Apple qui pousse ses machine vers iOS (et donc des terminaux mobiles).
Deuxième détail, Steve Jobs tend à s’effacer peu à peu au profit de ses collaborateurs. A la WWDC 2010, Jobs a assuré 1h35 (85% de la durée) à lui tout seul. Lors du Special Events de septembre consacré à iTunes, l’iPod et l’Apple TV, le patron n’avait cédé sa place qu’une seule fois et pour 5 minutes, assurant à lui seul 1h06 de présentation (93%). Cette fois, Steve Jobs n’a assuré « que » 52 minutes (57%), cédant même sa place à Tim Cook au bout de 50 secondes de Keynote, du jamais vu si ma mémoire est bonne.
Une telle chute du temps de parole accaparé par Steve Jobs ne s’explique pas par une quelconque variation statistique mais bien par un changement majeur dans la façon de communiquer de la firme de Cupertino. Les raisons peuvent en être multiples (changement stratégique, proximité de l’événement de septembre, santé de Steve Jobs, ou encore volonté de mettre l’équipe en avant), reste que nous assistons ici à une petite révolution.
Le fonds
Annoncée sous l’étiquette « retour au Mac », la conférence m’a paradoxalement donné l’impression qu’Apple a définitivement tracé une route qui l’éloigne à moyen terme de celui-ci. Sa stratégie est désormais ouvertement orientée vers les terminaux mobiles et iOS, OS X 10.7 faisant sien de nombreux éléments de son petit frère.
Pour preuve, le nouveau système d’exploitation frappé d’une pomme introduira sur nos ordinateurs des concepts jusqu’ici réservés aux iPhones et autres iPad: Gestes multitouch au moyen du Trackpad / Magic Trackpad, App Store, applications réunies en écrans type « iPhone », affichage en plein écran des applications, sauvegarde automatique, mise en pause des applications avec sauvegarde de leur état.
Du coup, le message d’Apple se brouille un peu. Quelles différence subsiste entre iOS et OS X, et pour combien de temps encore ? Le fait est que pour des utilisateurs de base, ceux qui apprécient les produits de la Pomme pour leur simplicité et ne « touillent » pas les réglages par défaut de leur machines, la frontière entre les deux va presque disparaitre. Ils naviguerons sur l’App Store et installerons des « Apps » avec la bénédiction (et le contrôle ?) de Cupertino, parcourrons leurs applications avec des gestes du doigts sur des surfaces tactiles et ne se soucierons plus de savoir où sont stockés leurs documents.
Tout cela est cousu de fils blancs. Le but final d’Apple étant vraisemblablement une fusion complète et totale de ses OS, pourquoi dès lors ne pas avoir franchi le pas ? La réponse est certes complexe mais l’on peut se douter qu’elle veut procéder en douceur. Changer les habitudes des consommateurs requière un grand nombre d’itérations pour ne pas les brusquer.
L’annonce du MacBook Air est, à ce titre, emblématique de ce processus de fusion. La « nouvelle » machine innove par son facteur de forme, sa batterie et son unité de stockage, trois éléments hérités des progrès techniques opérés par Apple sur le segment mobile (iPhone / iPad). Le MacBook Air, résolument « mobile », est en quelque sorte le chaînon manquant entre les deux mondes, celui de Mac OS X (MacBook) et celui d’iOS (iPad).
Au final, cette keynote laisse un arrière-goût de fin de règne pour les vieux lions. Pour OS X dont nous nous apprêtons sans doute à connaître la dernière version réellement différente d’iOS, pour le Mac dont le paradigme appartient à une ère (les ordinateurs) sur le point de s’achever (au profit d’appareils nomades et polyvalents) et enfin peut-être pour Steve Jobs qui est apparu, très loin de son image habituelle, effacé derrière son équipe.
Et ce sera qui le lion maintenant ?
Très bon billet, une fois de plus ! 🙂
La fusion des OS en un seul ? Je n’y crois pas une seconde.
Certes, il y aura des similarités afin que le consommateur puisse passer facilement d’un système à l’autre sans perdre de temps pour l’apprivoiser..
Pas le même OS car il me parait relativement difficile de proposer les mêmes fonctions sur un iMac et sur un iPhone / iPad.
Pas le même OS car le professionnel va vite dégager son XSERVE ou MacPRO si son OS Server ressemblera à une interface FisherPrice comme ce que propose le LaunchPad.
Pour rebondir sur le futur OS server, là encore, j’ai du mal à croire qu’on aura le même OS sur un iPhone. Et si Apple vire au passage quelques fonctions de l’OS Server pour l’iPhone/iPad, au final, ce n’est plus le même OS n’est ce pas ? ^^
Oui mais… c’est quand la dernière fois qu’Apple a mis à jour son XSERVE ?
Actuellement elle fait ses marges sur le secteur « grand public » et on ne peut pas dire qu’elle porte un effort délirant sur les pros (à propos, il est où iWork 11 ?).
Même si je suis d’accord avec toi sur le court terme, en se projetant plus loin on peut aisément imaginer la disparition pur et simple des PC tels que nous les connaissons (lire à ce titre ce billet: http://davidbosman.fr/blog/2010/10/26/une-ere-post-pc-meme-microsoft-le-dit/)
Et encore une fois, pour l’utilisateur lambda, la réalité ce sera LaunchPad et ce dès l’été prochain.
Tant pis pour les utilisateurs plus avancés dont nous faisons partie. Nous ne sommes qu’une toute petite partie du chiffre d’affaires d’Apple…
Je découvre avec pas mal de retard l’article de David Bosman qui va exactement dans la même direction que le miens (avec quelques jours d’avance). A lire, donc:
http://davidbosman.fr/blog/2010/10/21/os-x-est-mort-vive-ios/#more-8635
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